CPE, ou comment se tirer une balle dans le pied !
Seul parmi les députés UMP, j’ai voté contre le CPE. Je ne le regrette pas. Non pas parce que l’obstination du gouvernement provoque, hélas, une grave crise dans notre pays, assortie d’inadmissibles blocages d’universités, mais parce que je persiste à croire que cette mesure franchit la ligne jaune sur le plan des principes, démoralise une jeunesse qui n’en a pas besoin, ne s’attaque pas aux causes principales du chômage et est en train de gâcher les chances de la majorité pour 2007.
Comment, tout d’abord, accepter qu’un salarié soit licencié du jour au lendemain sans aucune explication ? Sans qu’il sache s’il a manqué de compétence, de savoir-faire, de motivation, ou s’il a commis une faute, ou encore s’il est tout simplement victime des contraintes économiques du moment ? Il n’est pas possible de bafouer à ce point la dignité des salariés, qui sont tout autant des citoyens français. De même, tous les amendements raisonnables qui ont été mis en avant pour humaniser et adoucir le dispositif - limitation à 10% des CPE par entreprise, interdiction de ces contrats pour les entreprises de plus de 500 salariés,...- ont été balayés sans autre forme de procès.
Ensuite, s’agissant d’un contrat spécifiquement destiné à la jeunesse, il est évident que cette jeunesse ne peut que se sentir une fois encore dévalorisée et promise un peu plus à une insécurité économique et sociale qui traumatise l’ensemble des Français mais la frappe en priorité. Il ne faut bien entendu pas chercher plus loin l’écrasante hostilité de l’opinion publique au CPE. Nos concitoyens ont légitimement peur pour l’avenir de leurs enfants et, par maladresse ou dogmatisme, on attise cette angoisse. Sans compter que les jeunes ont déjà eu leur compte avec la loi absurde et liberticide sur les droits d’auteurs, qui va permettre à l’oligopole des industries culturelles de verrouiller à son profit exclusif les formidables potentialités d’échange et de divertissement que constitue l’internet.
Quant à la lutte contre le chômage, cessons de nous raconter des histoires. La simplification du droit du travail est utile et nécessaire pour certains employeurs, mais tous sont loin de l’avoir demandé en ces termes. En fait, ce type de mesure ne pourrait que s’inscrire dans une action plus globale en faveur du retour à une économie d’expansion, tant il est vrai que la première cause du chômage, outre la question de la formation des salariés, réside dans l’atrophie chronique des carnets de commandes des entreprises. Il nous faut muscler l’économie française en la débarrassant des contraintes absurdes qui l’étouffent - libre échange intégral, euro cher, charges sociales pesant sur le travail,... - et la mobiliser grâce à un nouveau pacte économique et social avec les Français – nouvelle politique industrielle et de recherche, suppression de l’ISF pour les capitaux investis dans l’économie productive, relance massive de l’actionnariat salarié,... C’est tout le sens du vote massif des Français le 29 mai contre la Constitution européenne, ce formidable sursaut démocratique en faveur d’un renouveau national que les élites s’acharnent à leur refuser.
Pour l’heure, il est urgent pour la majorité de se sortir de cet immense gâchis. Il suffirait de retirer l’absence de motivation au licenciement pour éviter que la gauche, qui porte aussi, ne n’oublions pas, une responsabilité écrasante dans le chômage de masse, gangrène de notre République, ne se refasse une santé à bon compte. En vérité, les Français sont las de l’éternel petit jeu entre, d’un côté, une droite libérale aveugle à la crise économique et sociale et, de l’autre, une gauche qui en joue sans apporter aucune solution. C’est pourquoi, plus que jamais, je suis déterminé à proposer un projet de relance économique qui en surprendra plus d’un.
Nicolas DUPONT-AIGNAN
Député de l’Essonne
Président de Debout la République